Cela ressemble à des petits jetons en plastique d'un centimètre et demi de diamètre, finement ouvragés, teintés de rouille. On les trouve le long du littoral depuis le mois de mai d'après des usagers de la plage de Tombulu Biancu, à Furiani. « De quoi presque remplir un sac », assure un amateur de voile. Régulièrement, cette pollution s'échoue sur le sable et cette semaine encore, on en trouvait à Ficaghjola, au cœur de Bastia.
Après une enquête rapide, sans besoin d'un Sherlock de l'environnement, il se révèle que ces pastilles sont issues d'une usine de traitement des eaux usées. Celle de Bastia Sud ? « Cela ressemble effectivement à ce que nous utilisons dans les biofiltres, confesse Bernard Bombardi, directeur de la structure gérée par Acqua Publica, sous la responsabilité de la Communauté d'agglomération de Bastia. Mais nous ne sommes sans doute pas les seuls à travailler avec ce traitement biologique, d'autres usines comme la nôtre, le long du littoral, ont peut-être ce dispositif. Il y a aussi la possibilité que cela vienne d'encore plus loin comme ce fut le cas il y a deux ans pour une pollution que l'on pensait venir de chez nous et qui arrivait, finalement, du large... Ces petits filtres fixent, piègent les micro-organismes des eaux usées et permettent la dégradation de la pollution. Mais ils sont censés être retenus par des grilles et des crépines. C'est un traitement efficace. »
« La vérification se fera à l'automne »
La gêne est palpable mais le problème est connu depuis, à peu près, la sortie du confinement. Des signalements ont déjà été faits et pris très au sérieux. Le directeur lui-même a pu constater la situation sur la plage de la CCAS à Borgo !
« Quoi qu'il en soit, Acqua Publica prévoit d'intervenir cet automne. En pleine saison estivale, ce n'est pas possible, c'est risqué. Vérifier les grilles et les crépines immergées nécessite un arrêt, total ou partiel, du site et c'est un protocole très lourd. Mais la vérification se fera à l'automne, il faut bien sûr s'assurer d'où peut venir ou pas cette fuite. » Au Sivom de la Marana-Golo, qui possède une usine de traitement des eaux sur le cordon lagunaire, Antoine Filippi, le directeur des services, prend la chose au sérieux : « Nous avons entendu parler de cette pollution mais plus comme une rumeur. On n'a pas vu ces filtres sur la plage. Nous avons un procédé similaire de biofiltres mais nous fonctionnons avec des billes de polystyrène et notre exutoire a été inspecté cette année, sans anomalie trouvée. » Le courant marin sur cette façade de l'île étant de direction sud-nord, est-ce qu'une usine plus au sud pourrait être responsable ? Ou bien est-ce que cela viendrait d'Italie comme c'est le cas - souvent - pour certaines vagues de déchets ?
Corsea Care déjà sensibilisée
Il y a néanmoins une certaine urgence à réagir. A l'heure où l'on s'insurge logiquement de pollutions aux plastiques tous azimuts en Méditerranée, alors que les rorquals, les dauphins, les tortues meurent l'estomac gavé de déchets divers, que nos plages sont souillées régulièrement, ce dysfonctionnement arrive au pire moment.
Ce n'est peut-être pas la pollution la plus visible, la plus odorante mais elle existe et elle est liée à une activité humaine. La police de l'eau à la DDTM de Bastia n'a pas encore été avisée des faits : « Il faut que l'on sache exactement les masses de pastilles récoltées. Mais c'est vrai qu'il est très difficile de connaître avec précision la provenance de ce type de pollution. Il y a même des bateaux qui utilisent cette technique. »
Pour Pierre-Ange Giudicelli, co-créateur de l'association Corsea Care, forte de plusieurs bénévoles qui, chaque été notamment, ramassent les plastiques dans l'eau, le problème est connu : « Oui, il y a des bateaux qui ont ce système de dépollution avec ces pastilles mais ils sont rares. Nous, nous en ramassons des kilos sur la plage de la Marana notamment. On en trouve aussi côte ouest. Mais avec le jeu de la courantologie, c'est vrai que l'on ne peut rien affirmer. C'est pour cette raison que nous travaillons avec des scientifiques de l'Ifremer : nous relevons avec précision les pollutions et eux, ils moulinent ça dans leurs ordis et déterminent les provenances. Il y a deux ans, nous avions eu des millions de ces biofiltres dans l'eau et ils venaient en fait du golfe de Salerne, chez nos voisins italiens ! »
Faits de polyéthylène haute densité, ces filtres, qui n'ont plus rien de bio une fois en mer, se dégradent en microparticules et, flottant, attirent évidemment tous les oiseaux marins...
July 31, 2020 at 10:25PM
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Des pastilles de traitement des eaux s'échouent sur les plages - Corse-Matin
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En traitement
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